Henry-Edmond Poggi |
|
Tlemcen. 1898 Casablanca. 1956 |
|
Voici les paroles qu'il prononça peu avant sa mort : "Homo Dei, la place du prêtre est au point de rencontre des deux peuples, comme un vivant trait d'union, l'homme de tous". |
Henry-Edmond Poggi est né à Tlemcen (Algérie) le 21 août 1898. Après ses études secondaires au collège de cette ville, il vient à Alger pour étudier à la Faculté et obtient une licence en Droit. Tout en étant surveillant, puis professeur à l'Ecole Notre Dame d'Afrique, il se perfectionne en arabe et c'est sans doute cette écriture qui marque la sienne dont la ressemblance avec celle de Camus ... surprend! Chez les Jésuites de l'Ecole, sa vocation se précise et il confie à Mgr Leynaud(1) son désir de devenir prêtre. Après ses études de théologie à Saint-Eugène, il reçoit l'ordination sacerdotale le 29 juin 1927. Il est alors nommé professeur au Petit séminaire, mais l'archevêque qui a découvert l'homme placide, discret, en fait son secrétaire particulier et dès lors, l'abbé Poggi ne quittera plus l'Archevêché où pendant trente ans il servira le diocèse d'Alger. En 1931, il en devient le Secrétaire général, puis est nommé Vicaire général en 1936. Il rejoint donc Mgr Teullières et Mgr Dauzon(2), les collaborateurs immédiats de Mgr Leynaud qui le charge du "temporel", c'est-à-dire de toutes les questions matérielles, financières et en particulier de la construction des églises. Son bureau dans un angle du patio de l'archevêché -l'ancien palais Dar es Soltane du gouvernement turc- est très visité par des prêtres, des architectes, des notabilités, des artistes même, car il est aussi président de la commission d'Art sacré. Il est mobilisé' en 1939 et repart, après le débarquement américain de 1942, comme aumônier général des troupes, ce qui le conduit sur les fronts de Tunisie et d'Italie. Il sera d'ailleurs un des premiers prélats français à être reçu par le pape Pie XII à la libération de Rome. Il accède aux plus hautes dignités ecclésiastiques : chanoine en 1934 et protonotaire apostolique en 1941, ce qui lui donne le titre de Monseigneur. A cette occasion, il choisit pour devise à ses armoiries In cantate non ficta (dans un amour sincère). Le gouvernement français le nomme Chevalier de la Légion d'Honneur et Mgr Lacaste le prend comme chanoine de sa cathédrale à l'occasion de ses Noces d'argent sacerdotales. En 1945, le bruit courut qu'il deviendrait évêque d'Oran, à la mort de Mgr Durand. Ce ne fut pas le cas, et les Oranais l'ont bien regretté. Peut-être l'Algérie y aurait-elle gagné. Car Mgr Poggi, arabisant distingué, avait su se faire estimer de nombreux musulmans et fréquentait régulièrement le Cercle franco-musulman du 2 Boulevard Carnot où il rencontrait l'élite intellectuelle. Ne disait-il pas à des prêtres : "Nous réalisons déjà dans notre esprit et dans notre cœur, cette unité qui est le but providentiel de notre mission et que nous projetterons, presque tout naturellement autour de nous par nos paroles et notre comportement". Tous ceux qui l'ont approché ont témoigné de son dévouement, de son affabilité, de ses qualités d'esprit et de cœur, comme de sa discrète simplicité et de son rayonnement spirituel. Son confrère, Mgr Jacquier, Vicaire général d'Alger, témoignait ainsi, au jour de ses obsèques à Tlemcen : " On pouvait vivre vingt ans près de lui, sans qu'un nuage vint jeter quelque ombre fugace entre les esprits et les cœurs, tant sa courtoisie était la fleur toujours épanouie d'une charité vraie dont nous savons qu'elle se réchauffait chaque jour dans son intimité avec Dieu ... Il parlait à chacun sa langue et surtout ce langage de l'amitié qui ne voyait les différences que pour les fondre en une mutuelle et sincère compréhension... Combien un tel homme était utile à la cause de la paix". C'est en allant à Casablanca pour assister aux obsèques de son frère, qu'il succomba d'une crise cardiaque le 24 avril 1956. Son inhumation eut lieu dans sa ville natale le 16 mai 1956.
Louis ABADIE
1 Biographie d'Augustin Leynaud dans les Cahiers d'Afrique du Nord, N°5. 2 Biographie d'Emile Dauzon dans les Cahiers d'Afrique du Nord N°3.
|